L'histoire
Jean Podolsky est un peintre désoeuvré. Guère inspiré, blasé, dégoûté, il erre dans Paris sans objectif, enfermé dans ses pensées intérieures. Même sa petite amie Armande n'arrive plus à lui
rendre la joie de vivre.
Jusqu’au jour où, sur les quais de Seine, il croise un étrange savant, Dagerlöff. La verve de ce vieil homme tirent un instant Jean de ses rêveries morbides mais très vite le personnage lui
devient insupportable.
Car Dagerlöff partage avec lui son obsession de la mort et explique alors sa théorie du voyage dans la "causalité". Et si l’homme parvenait à se projeter dans le temps par celle-ci. S’il était
capable de voir le devenir de chaque chose au moment où l’on pose son regard dessus ? Alors que Jean se décide enfin à se suicider, le savant lui transmet un bacille, résultat de ses digressions
scientifiques. Une nouvelle vie commence pour Jean, plongé à son insu dans la "causalité".
Dernier Exil de Jean-Michel Ponzio est l'adaptation du roman de Jacques Spitz L'Oeil du purgatoire. Une adaptation osée pour ce qui est sans
aucun doute le chef-d’œuvre de Jacques Spitz. La complexité des réflexions de Dagerlöff n'était pas forcément aisée à retranscrire. Quant à l'ensemble du scénario, qui fait appel
à une psychologie profonde, torturée est tellement sombre, il fallait, j'imagine, une grande force pour s'immiscer en elle.
Jean-Michel Ponzio signe ici deux albums absolument maîtrisés, aboutis. Toute la force du livre est magnifiquement retranscrite. Le dessin, les couleurs aux sépias grisés sont sublimes
et collent parfaitement à l'atmosphère de l'œuvre.
Ponzio prend un grand soin à poser son personnage et sa réflexion borderline. Il y a une force incroyable, un réalisme extraordinaire dans les traits, mais aussi dans les
non-dits. Les bulles qui se superposent cachant les propos d'Armande au profit des pensées de Jean, offrent une sorte de réalité virtuelle.
Quelques cases donnent à penser que techniquement, certaines scènes ont pu être des photos, redessinées, colorisées. Ce qui est d'autant plus intéressant quand on voit l'importance que la photo
prendra dans une part de l'histoire.
Bref, une bande-dessinée magnifique à ne pas manquer, qui se suffit à elle-même.
S'il n'est pas utile d'avoir lu le livre de Jacques Spitz pour se plonger dans la BD, je vous conseille néanmoins cet incontournable de la SF (à la limite du fantastique)
française.
Jean-Michel Ponzio Dernier exil, 2 tomes (Carabas)
Mots-clés : avenir, expérience, mort, savant fou