Quatrième de couverture
Rescapés du chaos de la Grande Guerre, Albert et Édouard comprennent rapidement que le pays ne veut plus d'eux. Malheur aux
vainqueurs ! La France glorifie ses morts et oublie les survivants. Albert, employé modeste et timoré, a tout perdu. Édouard, artiste flamboyant devenu une "gueule cassée", est écrasé par son
histoire familiale. Désarmés et abandonnés après le carnage, tous deux sont condamnés à l'exclusion.
Refusant de céder à l'amertume ou au découragement, ils vont, ensemble, imaginer une arnaque d'une audace inouïe qui mettra le pays tout entier en effervescence... Et élever le sacrilège et le
blasphème au rang des beaux-arts. Bien au delà de la vengeance et de la revanche de deux hommes détruits par une guerre vaine et barbare, ce roman est l'histoire caustique et tragique d’un défi à
la société, à l’État, à la famille, à la morale patriotique, responsables de leur enfer.
Dans la France traumatisée de l'après guerre qui compte son million et demi de morts, ces deux survivants du brasier se lancent dans une escroquerie d'envergure nationale d'un cynisme
absolu.
Coup de coeur ! Ce ne sont pas les chroniques des romans que nous avons le plus aimés qui sont les plus faciles à rédiger surtout quand le
poids d'un prix reçu, comme celui du Goncourt, pourrait presque lui être préjudiciable. Le Goncourt on l'offre mais on le lit rarement. C'est sûrement l'adage qui lui conviendrait le mieux. Sauf
que...
Pierre Lemaitre est tout ce qu'il y a de plus légitime sur nos étagères, lui, l'auteur de polar encensé par la critique avec ces romans Robe de marié ou
Alex. Savoir qu'il a quand même, malgré son genre populaire de prédilection, été primé a attiré mon attention, d'autant que je n'avais pas encore lu les titres évoqués
ci-dessus.
Il m'a fallu trois jours (moins si je n'avais pas eu à travailler) pour finir ce pavé délectable de 565 pages. Au revoir là-haut est
une oeuvre romanesque comme on n'en lit plus beaucoup aujourd'hui.
Nous voici à quelques jours de l'Armistice, la guerre arrive à son terme et c'est sur la Cote 113, qu'on fait connaissance avec Albert et Edouard. Eux ne se connaissent pas encore mais quand
Albert est enseveli vivant par un obus, Edouard déjà gravement blessé à la jambe et témoin de la chose vient en aide à ce compagnon malchanceux. Cet acte héroïque lui coûtera la moitié du visage.
Rendu à la vie civile, Albert, redevable, reste auprès d'Edouard, la gueule cassée. C'est cette histoire d'hommes et d'amitié, ce destin funeste, qui nous capture totalement. Alors qu'autour des
deux amis gravitent aussi un père meurtri par le regret, un ancien lieutenant pourri reconverti dans l'escroquerie, une fillette muette, une femme délaissée et tant d'autres détestables ou
attachants. Cette émouvante et tragique fresque sur fond d'Histoire flirte aussi avec nos genres. Les arnaques en tous genres sont légions après la guerre et chacun y va de son imagination. Sur
quoi elles reposent, je vous laisse le découvrir.
A noter quelques passages assez "violents" décrivant Edouard et sa mâchoire en moins. Il est évident que ces lignes étaient incontournables car la défiguration du jeune homme est aussi au coeur
de ce drame. Mais la parade qu'il trouve pour cacher son visage effrayant donne lieu aussi à quelques paragraphes complètement loufoques qui donnent une bouffée d'air bien appréciée.
Quoiqu'il en soit, TOUTES les critiques positives que vous trouverez sur internet ou dans les journaux sont méritées. Et si je dois retirer le bandeau "Prix Goncourt" pour vous convaincre de le
lire... je suis prête à le faire . (Vous noterez que j'ai d'ailleurs mis en visuel la couverture avec son bandeau
original). Et OUI, il sera dans notre sélection de Noël.
Pierre Lemaitre Au revoir là-haut (Albin Michel)
Mots-clés : anciens combattants, arnaque, art, drogue, guerre 14-18, gueules cassées, hommage, homosexualité